Il n’y a pas si longtemps, BRÂAM publiait un article intitulé « À quoi ressemble l’espace de travail de demain ? ». Fondé sur une étude menée par la Fabrique Spinoza notre papier décrivait le bureau du futur. Entre temps, le Covid-19 est passé, précipitant notre société dans une transition accélérée. Demain, c’est maintenant. À la lecture des nombreuses analyses et études sur le « jour d’après », il semble que, dans ses prédictions, la Fabrique Spinoza ne s’était pas trompée. Télétravail, espace de convivialité, mobilité… BRÂAM vous dessine le portrait-robot d’un bureau du jour d’après.
1. Au jour d’après, un bureau sans open-space
Adapter les gestes barrières à l’entreprise est un véritable casse-tête. En open space ? C’est mission impossible. Installer des cloisons, aérer les locaux, maintenir le télétravail, certes, mais pour combien de temps ? Une question incontournable pour de nombreux employeurs puisqu’elle concerne au moins 18% des salariés français. Ne serait-ce pas l’occasion de se débarrasser de l’open-space ? Un environnement de travail qui, selon un sondage publié en 2017, mécontente ceux qui le pratiquent. Plus de la moitié des salariés en open space seraient prêts à accepter immédiatement un bureau individuel si on le leur proposait.
2. Le télétravail, mesure phare dans les bureaux du jour d’après
Confinés, nous avons été très nombreux à télétravailler. Interrogée lundi sur RTL le 20 avril, la ministre du Travail, Muriel Pénicaud, a déclaré que la crise sanitaire allait « changer le rapport au télétravail et [que] cela requestionn[ait] le temps que l’on passe dans les transports, la ”réunionite”». La solution trouvée par la Ministre pour faire face à la crise ? Amplifier la pratique du télétravail qui « pourrait devenir durable ».
Le télétravail sort donc grand gagnant du confinement. Nombreux sont les salariés qui ont découvert le télétravail et ses avantages. Selon un sondage réalisé par Cadremploi, publié le 9 avril 2020, 80% des cadres vivent plutôt bien cette période de télétravail imposée et 91% pensent d’ailleurs qu’à l’avenir le recours au télétravail est amené à augmenter. Le confinement annonce donc très probablement la fin du présentéisme tant décrié.
3. Un bureau « vitrine » pour le jour d’après
Selon une analyse de la Villa Bonne Nouvelle, l’espace de « corpoworking » du groupe Orange, laboratoire ayant pour mission de préparer le futur du travail, parue dans Forbes le 7 avril, « les entreprises vont devoir accepter de repenser en profondeur leurs grands ensembles tertiaires pour les rendre plus efficients, serviciels et agréables ». « Il sʼagit de redonner envie aux collaborateurs de venir travailler, collaborer, créer ensemble, dans des espaces moins consommateurs de m², réduisant ainsi les coûts fixes de l’entreprise », détaille l’article. Concrètement ? Le bureau post-covid deviendrait une vitrine du savoir-faire managériale de l’entreprise et de ses valeurs. L’entreprise physique serait alors de plus petite taille pour accueillir les temps collectifs, créer du lien et de l’engagement. Ce sera l’espace de créativité, de travail en équipe, le lieu de la convivialité, du lien social, des rendez-vous, des réunions physiques indispensables et de la pause-café.
4. Jour d’après, le travail multi-sites
Est-ce possible d’envisager un monde où le travail serait accompli à 100% en télétravail ? Le full remote est pratiqué par certaines entreprises telles que Github, Buffer, Auttomatic (WordPress) ou les frenchies Platform.sh ou BoondManager. Mais ce mode de fonctionnement atypique n’est pas applicable à toutes les entreprises. C’est l’apanage des startups tech. Et il n’est d’ailleurs pas recommandé. Aurore Flipo, sociologue spécialisée sur les questions de mobilité et de stratification sociale, interrogée par Welcome to the Jungle, n’est « pas sûre que l’importance du lieu de travail va disparaître suite à cette crise. Le télétravail a tout de même un inconvénient majeur qui est l’absence, ou la quasi-absence, de liens sociaux ».
Le jour d’après, le travail serait donc dispersé entre le home office, les espaces de coworking et le siège de l’entreprise. Après le télétravail, une seconde phase consistera à utiliser les tiers lieux pour travailler dans un cadre calme et motivant et pour se réunir en petits groupes de travail plus agile. Selon l’étude de la Villa Bonne Nouvelle, « Le siège social va ainsi devenir un camp de base de passage et le travail va se répartir sur différents lieux adaptés aux usages de chacun entre le home office, des espaces de coworking ou de corpoworking dédiés à la collaboration interne ou externe ».
5. Un bureau plus humain dès demain
Ce qu’a encore révélé le confinement ? L’importance des relations humaines et du lien social. Le bureau du jour d’après sera sans aucun doute le lieu du management bienveillant et de l’écoute attentive. Pour la Villa Bonne Nouvelle, une des conséquences majeures du confinement dans le monde professionnel c’est un « certain lâcher prise vis-à-vis des éléments statutaires, une incitation à lʼautonomie, une capacité accrue à verbaliser les doutes, lʼécoute, lʼutilisation dʼastuces dʼanimation pour créer de la proximité ». Détresse psychologique, effacement des frontières pro et perso, épuisement, angoisse, le confinement a révélé l’humain derrière le salarié. Au jour d’après, dans les bureaux, on se verra moins, mais on se verra mieux, conclut cette analyse.
6. L’entreprise, un lieu d’engagement
On le lit partout, le confinement réveil plus que jamais la quête de sens. Dans nos cerveaux confinés, nous avons remis en question notre rapport au travail et au temps de travail. Ceux qui n’ont pas été appelés en première ligne se sont certainement posé la question de leur utilité. Conjuguer éthique et travail sera probablement la quête des travailleurs du jour d’après. L’entreprise et, à travers elle ses bureaux, devront apporter aux salariés du sens et de l’engagement au quotidien. Ce que recherchent le travailleur du jour d’après ? Un travail utile, à l’impact positif. De l’organisation de ses bureaux, au management, en passant par son activité, l’entreprise devra être parfaitement alignée avec les valeurs du travailleur…
7. Jour d’après, des bureaux plus écolo
Selon le sociologue Jean Viard, directeur de recherches CNRS au Centre de recherches politiques de Sciences Po Paris, interrogé par Welcome to the Jungle, « il va y avoir de nouvelles attentes : les gens vont avoir peur des transports en commun, donc on va davantage utiliser le vélo, les déplacements à pied, et la voiture ». Voilà une belle avancée pour la mobilité verte. A cet égard, le confinement nous aura révélé l’impact de l’activité humaine sur l’environnement. Pour les plus sceptiques, la question ne fait plus débat. Avec le confinement, nous avons tous observé la chute des taux de pollution, le retour des animaux et l’importance de notre lien à la nature. L’écologie est l’affaire de tous, notamment de l’entreprise. Avant le confinement, le monde du travail a vu émerger l’arrivée de certains éco-gestes, après lui il est fort à parier que l’entreprise devra aller plus loin.
8. Mobilité, un bureau facile d’accès
Le télétravail a révélé le confort d’une journée sans transport en commun. Des transports qui seront de toute évidence boudés après le 11 mai. Certes, tout le monde ne peut pas se rendre à pied ou à vélo au travail. Mais, faire des kilomètres, serré dans les transports, pour aller travailler ne sera plus envisageable le jour d’après. On l’a vu avec le phénomène « Appart solidaire », consistant à prêter un logement aux soignants pour les rapprocher de leur lieu de travail. La proximité est un critère important. Les bureaux du jour d’après seront donc probablement plus proche de votre domicile si vous ne pouvez pas télétravailler.
9. Des espaces de travail virtuels le jour d’après
Zoom, Google hangouts, Starleaf et autres outils de conf-call nous ont prouvé que nous n’avons pas toujours besoin de nous réunir pour travailler, même en équipe. Prendre un avion pour se rendre à un colloque d’une journée n’existera plus dans le jour d’après. Vous pourrez voyager, vous rendre à des réunions ou encore assister à une conférence depuis votre canapé. Le bureau va donc laisser de la place aux espaces virtuels. D’abord avec des outils de communication en intranet, ensuite avec des espaces dédiés à ces visio-conférences.
Nous n’avons jamais expérimenté le bureau du jour d’après. Mais une chose est sûre il devra s’adapter aux aspirations des salariés et placer l’humain au cœur de sa conception. Bien que le confinement ait révélé les avantages du télétravail, après seulement une semaine de confinement 76% des Français regrettaient déjà leur bureau…